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Surveillance des employés : La Cour Européenne des Droits de l’Homme légitime le contôle des emails

Le 08 février 2016
la Cour Européenne des Droits de l'Homme a décidé que la vie privée de l'employé n'est pas violée lorsque l'employeur surveille et interdit au préalable l'utilisation privée des ressources informatiques qu'il a mis à disposition.

Le 12 janvier dernier, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a rendu un arrêt qui pourrait, semble t-il, mettre fin au débat quant à la licéité des contrôles des boîtes emails professionnelles par l’employeur. Cet arrêt est susceptible d’avoir de fortes répercussions dans certains pays comme le nôtre.

Les faits

Le 13 juillet 2007, Monsieur Barbulescu, employé roumain, est informé par son employeur que ses communications via Yahoo messenger ont été surveillées et que les enregistrements montrent que ce dernier a utilisé Internet à des fins personnelles via un ordinateur de la société et durant les heures de travail. Le 1er août 2007, l’employeur met fin au contrat de travail pour infraction au règlement intérieur de la société qui prévoit notamment l’interdiction d’utiliser les ressources de celles-ci à des fins personnelles.     

Monsieur Barbulescu épuise alors tous les recours au niveau national avant d’arriver devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme devant laquelle il soutient que sa vie privée a été violée.

La vie privée en Belgique                                    

En Belgique, l’employeur doit respecter plusieurs principes en vue de protéger la vie privée du travailleur :

-          Principe de finalité : l’employeur doit impérativement poursuivre un but légitime ;

-          Principe de proportionnalité : le contrôle doit être limité au strict nécéssaire ;

-          Principe de transparence : le travailleur doit être informé du contrôle éléctronique éventuel et de la manière dont celui-ci est fait (par une Convention Collective de Travail ou C.C.T. ou dans le contrat de travail individuel par exemple).

Selon la C.C.T. n°81, le contrôle des données électroniques n’est autorisé que si l’une ou plusieurs des finalités suivantes est ou sont poursuivies :

1)      La prévention de faits illicites ou diffamatoires, de faits contraires aux bonnes mœurs ou capables de porter atteinte à la dignité d’autrui ;

2)      La protection des intérêt économiques, commerciaux et financiers de l’entreprise ;

3)      La sécurité et/ou le bon fonctionnement technique des systèmes informatiques en réseau d’entreprise ainsi que la protection physique des installations de l’entreprise

4)      Le respect de bonne foi des principes et règles d’utilisation des technologies en reseau fixés dans l’entreprise.

 

 

Les enseignements de la Cour Européenne des Droits de l’Homme

La Cour rappelle que de nombreux arrêts confirment que l’être humain a droit, même sur son lieu de travail, au respect de sa vie privée.

 Dans l’arrêt qui a été rendu le 12 janvier 2016, la Cour ne revient pas sur la jurisprudence antérieure mais veille à appliquer les mêmes principes à des faits différents.

En effet,le droit à la vie privée n’est pas absolu dans la mesure où il coexiste avec les droits de l’employeur, dont celui de pouvoir vérifier si les employés exécutent les tâches qui leur sont assignées correctement.

En l’occurrence, l’employé était dûment informé du fait qu’il était totalement interdit d’utiliser les ressources informatiques de son employeur à des fins privées. Il existe donc une prévisibilité du contrôle.

La Cour a fait preuve dans cet arrêt d’une recherche de l’équilibre entre le droit de l’employeur à contrôler le travail de ses employés et le droit de ces derniers à une vie privée.

En Belgique plus qu’ailleurs cet arrêt aura sans doute un impact important en la matière et ce, dans la  mesure où sa législation phare, soit la C.C.T. n°81 n’autorise un contrôle que dans les limites très strictes évoquées ci-avant.

Le futur nous dira quelle suite la Belgique donnera à cet arrêt.