La loi pot-pourri II : le point sur la réforme en droit pénal
Le but de cette loi étant d’arriver à une Justice plus efficace et plus juste, nous analysons si réellement le législateur tend vers cet objectif.
Nous vous proposons un bref examen de ce Pot-Pourri II.
- 1. Le « Guilty plea » : une reconnaissance préalable de la culpabilité
Comme dans le modèle américain, le suspect reconnaît directement sa culpabilité devant le Tribunal.
Grâce aux aveux de l’auteur, la victime réclamera une indemnisation du dommage subi.
Cette possibilité est ouverte aux faits punis d’une peine de prison inférieure à 5 ans.
Dans l’hypothèse où le suspect a « plaidé coupable », aucun débat ne devra plus être mené. Le Ministère Public se bornera à proposer ou non une éventuelle réduction de peine.
Toutefois, le magistrat statuera sur le fondement du « guilty plea ».
Complémentairement, le législateur modifie également le régime des transactions pénales.
En effet, celles-ci devront être indiquées dans le casier judiciaire de l’auteur.
Ces transactions ne seront plus possibles après une première condamnation.
- 2. Rapatriement des condamnés en séjour illégal
Les individus, sans droit de séjour, condamnés en Belgique pourront être rapatriés 6 mois avant la fin de leurs peines (au lieu de 2 mois).
Concrètement, les modalités d’exécution de la peine qui visent à une réinsertion sociale dans notre pays ne pourront plus être octroyées.
- 3. Correctionnalisation et Cour d’Assises
Le législateur a souhaité correctionnaliser le plus grands nombre de crimes possibles. Plutôt que de faire juger ces crimes graves par la Cour d’Assises, jugée trop onéreuse, ils seront donc traités par le Tribunal Correctionnel.
Cependant, le Ministère Public appréciera si le crime ne doit pas malgré tout être porté devant la Cour d’Assises.
La procédure d’Assises deviendra une procédure exceptionnelle.
Seuls les faits criminels graves commis contre des policiers, des mineurs et pour lesquels la famille conteste la correctionnalisation.
Enfin, en Assises, les juges professionnels seront dorénavant présents lors de la délibération concernant la culpabilité du suspect. Ils ne disposeront pas d’un droit de vote.
- 4. Surveillance électronique en tant que peine autonome
Cette loi entrera en vigueur le 1er mai 2016.
Le juge aura dès lors d’autres alternatives à la peine privative de liberté, qui doit être considérée comme un remède ultime.
- 5. Nullité en cas de vice de forme concernant les écoutes téléphoniques
Dans le passé, un vice de forme dans la mise en place de l’écoute téléphonique provoquait la nullité de l’écoute. Cela ne sera plus le cas.
En effet, il faudra démontrer que la faute est suffisamment grave, lourde et contraire au procès équitable pour que l’écoute soit écartée.
- 6. Procédure d’opposition en matière pénale
L’opposition ne sera plus valable que lors de l’audience d’introduction et fortement diminuée.
En effet, elle ne pourra dès lors plus qu’être formulée qu’en cas de force majeure ou pour toute raison valable.
Cependant, le droit au second degré de juridiction est maintenu.
- 7. Diminution des formalités auprès des opérateurs de communication
Les formalités seront moindres lorsque des renseignements seront demandés aux opérateurs de communication par la Sûreté de l’Etat et le Service général du renseignement et de la sécurité (SGRS).
Des inquiétudes pour l’avenir
On le voit, les droits de la défense font l’objet d’une réduction importante (guilty plea, diminution des possibilités de faire opposition, déséquilibre entre le prévenu et le Ministère Public…) mais aussi dans le chef des victimes (réduction de la Cour d’Assises à peau de chagrin).
L’Ordre des avocats des Barreaux Francophones et Germanophone n’a d’ailleurs pas manqué de faire part de ses inquiétudes.
Force est de constater que le législateur n’a pas entendu la voie des praticiens du droit. Une chose est certaine, le travail de l’avocat sera encore plus difficile…